Manca 2013
CIRM

Édito 2013

« Le rayon vert » est un phénomène optique rare qui peut être parfois observé juste après le coucher du soleil ou juste avant son lever et qui prend la forme d'un point vert visible pendant un court moment juste au-dessus du soleil. Son observation est généralement brève (quelques secondes). Selon une légende écossaise, le rayon confère à ceux dont il a frappé les yeux le pouvoir de lire clair dans les sentiments et les cœurs. »

Existerait-il un « rayon vert de l’audible » dont la réalité avérée pourrait puiser ses racines autant dans l’imaginaire poétique collectif que dans la rationalité d’un phénomène scientifique ? C’est en tous cas cette quête que nous aimerions mener au CIRM (organisateur des MANCA) et partager avec le public le plus large.

Dans nos studios de l’Avenue Jean Médecin, lorsque nous créons des pianos imaginaires, lorsque nous prolongeons les sonorités d’un cor (Fuminori Tanada) ou celles de la contrebasse (Yann Robin) ou lorsque que nous enrichissons la déjà luxuriante palette de l’orchestre symphonique (Vladimir Tarnopolski) ce n’est jamais une fin en soit ; c’est au contraire pour nous mettre au service de l’imaginaire du compositeur, au carrefour de ses intuitions et de ces nouvelles couleurs qu’il entend nous faire partager à tous.

Ainsi, le rationnel de la programmation informatique n’est pas l’ennemi du rêve, bien au contraire il en constitue l’outil. Il en est tout autant le pinceau que la palette, rien de plus. C’est essentiel, mais en aucun cas garant de la qualité artistique du projet.

Tout comme le fait de pouvoir expliquer le rayon vert par un phénomène optique de décomposition de la lumière n’atténue aucunement la poésie du moment, la création musicale avec technologie, si elle peut faire l’objet de présentations rationnelles, n’a pas d’autre but que de permettre à l’auditeur de « lire clair dans les sentiments et les cœurs » de ceux qui la mettent en œuvre.

En 2001, Jonathan Harvey était venu pour la première fois dans nos studios pour travailler à la réalisation technologique de "The summer cloud's awakening" ; une œuvre magnifique dont nous avions programmée la création mondiale avec le New London Chamber Choir sous la direction de James Wood lors des MANCA 2001. Lors de sa venue dans nos studios à l’été 2001, plusieurs fois nous sommes allés nager ensemble après la journée de travail. Nous parlions de l’avancement de son oeuvre, mais malgré l’heure tardive et de magnifiques couchers de soleil, nous n’avons jamais vu le rayon vert. Le 4 décembre dernier, il est parti pour d’autres rives et cette fois-ci, je suis sûr qu’il l’a vu ! Cette 34ème édition du festival MANCA est tout naturellement dédiée à sa mémoire.

François Paris

 

Manca 2012