Quatre textes de différentes époques. En voici les diverses sources :
la poésie visuelle contemporaine, le chant de la cour de Pétrarque,
quelques inscriptions peintes sur des vases grecs.
La nature
visuelle des poèmes du brésilien Augusto de Campos est reprise en une
articulation musicale ; ceci offre à la langue de nouvelles
possibilités au-delà des interactions traditionnelles entre la musique
et le texte. Pulsar, à la frontière entre la respiration et le chant,
demande un contrôle particulier de la voix. Dans le fleuve continu des
sons, les couplets coulent comme des segments homogènes ; à la fin
cependant, la suite des couplets changent alors que certaines parties
du texte viennent se répéter et se superposer. Les étoiles qui
remplacent la voyelle " e " et les cercles à la place de la voyelle " o
" se différencient dans le son par une articulation correspondante. Les
nuances dynamiques correspondent à l’importance de ces signes.
Pendant
tout le morceau, on demande aux chanteurs de séparer mécaniquement les
phonèmes : scandés par les chanteurs, c’est seulement l’auditeur qui
les assemble alors en continuum de mots et de sens. Le poème apparaît
comme une image fermée constituée de six unités de six vers. Dans la
musique, cette compacité visuelle du poème est exprimée par la lecture
simultanée de plusieurs extraits du texte (à chaque fois quatre des six
vers) qui engendre un spectre sonore très complexe. Le texte reste
compréhensible tant que la série de ces lectures synchronisées est
graduelle, ordonnée et continue : on a juste besoin de se rattacher à
ce qui ressort de temps en temps. Certaines séries organisées selon
d’autres critères produisent par contre des textes parallèles
difficiles à identifier. Le tout est porté par des répétitions
continues du texte, qui sont placées et repoussées les unes sur les
autres avec leur métrique différente pour finalement former un
entrelacement d’aucune densité homogène. Pour indiquer le caractère
cyclique du processus, Quasar s’achève par un do capo partiel.
Source : GRAME
"
Je n’ai pas pu savoir quelle relation a liée H.G Wells à Pétrarque.
Justement parce que les siècles semblent les séparer, je voudrais faire
remarquer un fait particulièrement intéressant. Dans le roman La
machine à explorer le temps de Wells, le protagoniste est capable de
voyager dans le temps. Lorsqu’il place le curseur de la machine sur une
position avancée dans le temps, il se retrouve dans un environnement
inquiétant, désert et sans âme qui vive : c’est la terre vue d’une
perspective s’étendant au-delà de l’espèce humaine. Pétrarque dessine
une image similaire dans son livre Triomphe de l’éternité. Ce qui est
remarquable ici, c’est qu’un croyant est capable de voir un avenir
asséché même du sens de la vie. La musique tente alors de s’approprier
l’apparition du vide, un écho en perpétuel devenir. Est-ce une voix qui
a survécu et qui vient nous parler de la désolante éternité, ou bien
est-ce l’écho de l’humanité elle-même disparue ? Les Grecs en peignant
sur les vases nous ont livrés une image très précise du monde, même
dans les détails, dans leurs vies privées, dans leurs existences
particulières. C’est comme si les Grecs et leurs vies se reflétaient à
la surface des vases. Potiers, peintres, personnes représentées,
donateurs et bénéficiaires, tous parlent et chantent une imposante
langue figurative. J’ai réuni certaines de ces inscriptions, de fines
lignes, suspendu à des lèvres ouvertes pour toujours ".
Salvatore Sciarrino
Four
texts of different time periods, and several diverse sources inspired
this work: these sources include contemporary visual poetry, the song
of the court by Pétrarque, and specific painted inscriptions on Greek
vases.
The visual nature of the poems by Brazilian poet Augutso de
Campos is reprised in musical articulation; this offers new language
possibilities, which far exceed the traditional interactions between
music and text. Pulsar, at the border between breathing and singing,
demands a particular control of the voice. The sounds continue like a
river, the verses flow like homogeneous segments. However, ultimately
the homogeneous segments are changed so that specific parts of the text
are repeated in a cannon. Written in the poem, stars replace the vowel
“e” and circles replace the vowel “o”, these symbols are different in
sound by corresponding articulation. The dynamic nuances correspond to
the importance of the signs. Throughout this entire piece, the singers
are demanded to mechanically separate the sound of the language:
chanted by the singers, the listener must assemble the continuity of
the words and their meanings. The poem is visualized as a closed image
made up of six units and six verses. In the music, the visual capacity
of the poem is expressed through a repetitious cannon, (groups of 4
lines throughout the 6 verses) which generate a very complex spectrum
of sound. The text rests comprehensible as long as the series of the
synchronized lectures is gradual, tidy and continuous: one only needs
to link themselves to that which comes out from time to time. However,
certain organized series without the rest of the produced criterion
make the parallel texts difficult to identify. The work is engaging due
to the continuous repetitions of the text, which are finally
intertwined. For indicating the cyclical process of the character,
Quasar finishes the work by a partial do capo.
Source: GRAME (traduction : Allison Gerthoffer)
“I
couldn’t know what relationship connected H.G. Wells to Pétrarque. Due
to the fact that the time periods were far apart, I wanted to make a
particularly interesting reference. In the novel The Time Machine by
Wells, the protagonist is capable of traveling through time. When he
sets the machine to travel to the future, he finds himself in a strange
environment worried, stranded, and alone: he saw the earth inhabited,
without human reference. Pétrarque draws a similar image in his book
Triomphe de l’éternité. What is remarkable in this work, is the idea of
having the ability to believe in a future, while lacking any sort of
direction in life. The music tries to befit itself by having an
appearance of emptiness, which serves as an echo in becoming
everlasting. Is it a voice that survived and returned to humanity to
speak to us of eternal distress, or is it the echo of humanity itself
disappearing? That which the Greeks painted on the vases delivers to us
a very precise image of the world; in the details on the vases one can
see their private lives in their particular existences. It is as if the
Greeks reflected their lives on the surface of the vases. Potters,
painters, representative people, donators and beneficiaries, all speak
and sing an imposing figurative language. I have reunited certain
inscriptions, of fine lines, hanging from open lips forever.”
Salvatore Sciarrino (traduction : Allison Gerthoffer)
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