Les Couleurs de la Cité céleste se réfèrent à l’Apocalypse dont Messiaen donne cinq citations dans la partition :
1/ «Un arc-en-ciel encerclait le trône…» (Apoc., IV, 3)
2/ «Et les sept anges avaient sept trompettes…» (Apoc., VIII, 6)
3/ «On donna à l’étoile la clef du puits de l’abîme…» (Apoc., IX, 1)
4/ «L’éclat de la ville sainte est semblable au jaspe cristallin…» (Apoc., XXI, 11)
5/ «Les fondements du mur de la ville sont ornés de toute pierre
précieuse : jaspe, saphir, chalcédoine, émeraude, sardonyx,
cornaline, chrysolithe, topaze, chrysoprase, hyacinthe, améthyste…»
(Apoc., XXI, 19, 20).
Le caractère religieux est également affirmé par des références au
plain-chant (la petite trompette joue par exemple un extrait de
l’Alleluia du huitième dimanche après la Pentecôte lors de la première
intervention des cuivres) et par des sections d’écriture lente, en
choral, où apparaît parfois l’indication «extatique».
Cette oeuvre révèle par ailleurs un souci d’expression de la couleur –
sa «motivation essentielle» selon Michèle Reverdy, clairement formulé
par Messiaen dans la préface de sa partition : «La forme de cette
oeuvre dépend entièrement des couleurs. Les thèmes mélodiques ou
rythmiques, les complexes de sons et de timbres, évoluent à la façon
des couleurs. Dans leurs variations perpétuellement renouvelées, on
peut trouver (par analogie) des couleurs chaudes et froides, des
couleurs complémentaires influençant leurs voisines, des couleurs
dégradées vers le blanc, rabattues par le noir. On peut encore comparer
ces transformations à des personnages agissant sur plusieurs scènes
superposées et déroulant simultanément plusieurs histoires
différentes». La musique rassemble ici divers matériaux (plain-chant,
rythmes hindous, grecs, chants d’oiseaux, accords «colorés», etc.) et
peut être commentée en termes d’alternances de différents types
d’écriture ; l’idée de ces oppositions fut même associée par
Messiaen à certaines images (l’abîme, l’arc-en-ciel). Cette pièce qui
rappelle par moments les Oiseaux exotiques mais anticipe aussi dans
d’autres passages sur les grands chorals de la Transfiguration,
apportait dans l’évolution du compositeur une conception spécifique de
la forme : «…l’oeuvre ne se termine pas – n’ayant jamais commencé
vraiment : elle tourne sur elle-même, entrelaçant ses blocs
temporels, comme une rosace de cathédrale aux couleurs flamboyantes et
invisibles…».
Source : Ircam
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